Depuis la guerre du Liban, la consommation de tabac et d’alcool, voir de cannabis, touche plus sérieusement les jeunes. C’est ainsi que la dynamique Zeina Moukarzel, ancienne anesthésiste-réanimatrice à l’Hôpital de Geitaoui, a fondé en 2013 l’Association LAMSA afin de lutter contre l’addiction à ces trois fléaux. Rencontre.
Ayant fui la guerre civile libanaise à 25 ans vers la France, où elle achève ses études de médecine générale commencées au Liban ; elle se spécialise dans l’Anesthésie et la Pédiatrie à l’Hôpital Necker-Enfants Malades. Sur tous les fronts, elle cumule deux emplois en parallèle, dans l’assistance publique en France et en tant que réanimatrice à l’Hôpital de Geitaoui, avant de revenir avec sa famille s’installer dans son pays natal, le Liban en 1993.
Active pendant plus de 16 ans à l’Hôpital Geitaoui, elle occupe jusqu’en 2011 le poste de Cheffe du Département de Réanimation et responsable du Centre des grands brûlés. Les étés 2006 et 2007 changent sa vie, du fait des conflits armés qui créent de nombreuses victimes brûlées dont elle s’occupe. « C’était un travail très éprouvant moralement, c’était la première fois que je ressentais le stress psychologique de ma profession suite à la détresse des victimes », explique-t-elle.

Désireuse de faire une différence, elle choisit de s’investir dans le social et est engagée pendant deux mois par l’APAF, une agence d’accréditation de qualité pour les bâtiments et hôpitaux, en partenariat avec le Ministère de la Santé libanais et la Haute Autorité de la Santé française. « J’avais terminé mon Master en 2007 à l’ESA de gestion des hôpitaux et de la santé. J’ai donc été recommandée pour aider l’APAF à accréditer des hôpitaux de province et d’autres grandes villes libanaises, au nord comme au sud. C’était un beau hasard ! Cela m’a amené à découvrir des hôpitaux de périphérie de grande qualité. »
Toujours en mouvement, incarnant parfaitement de son action désintéressée l’exemple du serment d’Hippocrate, Dr Zeina Moukarzel se rend donc à l’USJ où une collègue infirmière l’oriente vers un diplôme sur l’addictologie: « J’avais l’expérience des traitements à base de morphine et d’analgésiques pour soigner les grands brûlés. Souvent, il fallait recourir à des placebos afin d’éviter qu’ils ne deviennent accros, mais lors de mes études sur l’addictologie j’ai découvert tout un nouveau monde : tabac, alcool, cannabis, drogues dures… Je me suis rendu compte du milieu dans lequel vivent nos jeunes, tout ce qu’ils se procurent. Je me suis dit qu’au lieu d’emprisonner les toxicomanes, il faudrait les soigner. »
Avec trois amis dont un psychiatre réputé, le Dr Wadih Naja, elle monte donc l’Association LAMSA en 2013, qui vise d’abord à conseiller et avertir, mais aussi soigner, les adeptes du tabac, cannabis et alcool. Avec très peu de moyens, elle se repose sur la clinique de tabacologie qu’elle a ouverte en parallèle à la Clinique du Sacré-cœur à Baabda, clinique qu’elle abandonne en 2015 afin de se consacrer à sa famille et aussi à l’associatif.
Depuis, avec des bénévoles notamment issus de l’Association des étudiants en Pharmacie de la LAU, elle forme des groupes capables de réaliser des ateliers d’éveils et de prévention destinés aux jeunes libanais à partir de 15 ans sur les dangers de la consommation d’alcool, de tabac et de cannabis. Les bénévoles participent également à des festivals et des événements sociaux ludiques, proposant par exemple au public de venir tester leur taux de dioxyde de carbone et de s’informer par la même occasion.
« Maintenant, je souhaite me concentrer sur le rôle à jouer des médecins, de toutes les spécialités mais aussi des généralistes», poursuit-elle. « Il sont de plus en plus intéressés de participer à des ateliers capables de les former à « l’entretien de motivation ». Technique qui consiste en des fréquentes consultations de 5 minutes destinées à pousser les patients à stopper progressivement leur consommation addictive en leur proposant un soutien important grâce à une écoute active et régulière. Ce n’est certes pas évident, mais cela doit passer par eux. »
Son dernier projet en date est de mettre en place à la rentrée une clinique mobile qui irait dans les zones rurales libanaises « ce projet demande des sponsors et un budget adapté car hélàs tout se passe à Beyrouth, et pas assez dans les villages. »
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Juin 2016
